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Ballade funèbre

Dick Annegarn

J'ai fait ma descente seul. J'ai descendu les escaliers de l'abîme
J'ai découvert que c'est, sur terre, un enfer asphyxiant

Des tas de gens le long des rues
Des gens vivants, des gens vécus
Parmi la foule en transcendance
Une petite camionnette bleue avance
Le ciel est jaune, phosphore et gris
Entre les antennes de télévision
Les journaux crient, les radios hurlent:
Des super bons, pour la super supercherie
Super-super-supermarché, grande surface pour petite tête
Tout le monde y marche, tout le monde y tette
Tout le monde y somnambule peut-être

Je fais des rêves qui me font peur
Surtout quand je les rêve les yeux ouverts, grands

Et si j'en ris, j'en ris amer
De ce spectacle ici sur terre

Les rues pleines de bagnoles, comme un vendredi
Autour de la ville, une auréole de jaune et de gris

C'était un jour, comme tous les jours
Les gens rentraient de leur travail
C'était un jour, comme tous les jours
Dans tous ses monotones détails

Les mains tremblent encore des machines, les O.S. se couchent
Les trains du soir sont anonymes, dactylos ni touches
La carte orange, un million, ni reconnus, ni méconnus
La carte orange, un million, tous les records sont battus!

La maman va à la maison, le papa aussi
Les enfants sont à la maison, faut les mettre au lit
L'accordéon, l'amour toujours, la politique téléfiction
L'accordéon, l'amour toujours, et moi, ici, je fais le con

Je me balade dans les ténèbres de la rue Gambetta
Je swings tout seul, des ballades funèbres, quand la bombe éclate...

Je fis, je vis à peine
Dans les décombres, dans les décombres de la ville, dans les décombres
La suie me pique les yeux, je ne vois pas à deux doigts
Dans les décombres
De la ville, dans les décombres

Et j'en ris, j'en ris a peine, mais j'en ris quand même
Dans les décombres
Dans les décombres de la ville, dans les décombres

Je crie, j'ai peur de me perdre, j'ai peur de me perdre
Je ne suis pas seul. Nous sommes toute une clique de classes
On n'a même pas eu droit au jugement dernier
Nous carburons à l'eau bénite
À l'eau de javel et au white-spirit
Nous ne sommes ni épiques ni poétiques
Nous sommes des cavaliers aéronautiques
Nous survolons cet incendie mondial, en avipétrolette

L'archange est mort, Lucifer aussi
Les jurés sont partis
Les âmes sont classées, par les déclassées
Eux restent, agglutinés à la terre

Au réverbère
Dans les impasses, de villes vides de braves gens
Et nos yeux regardent plus, plus que parterre
Terre aimée, abandonnée à leur balade
Leurs randonnées aviquestres

Volons au secours de nos amis d'amour
Qui sont pas arrivés à décoller
Va Joseph, vas-y Amédée!
On n'y voit pas bésef dans cette fumée

T'as qu'à t'accrocher au porte-bagage
Y a des repose-pied
Nous aussi, on a tout plein de petits copains
Ce n'était pas pour rien


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